23 août 1942 Lettre pastorale de Mgr Saliège

Le 23 août 1942, le cardinal Jules Saliège, archevêque de Toulouse, faisait retentir son appel à la conscience chrétienne et humaine, contre les rafles des Juifs décidées par le gouvernement de Vichy. Il fut suivi par plusieurs évêques dont Mgr Théas, alors évêque de Montauban, et le cardinal Gerlier, archevêque de Lyon, et aussi le pasteur Boegner.

Le grand rabbin de France, M. Haïm Korsia, a demandé à tous les rabbins du Consistoire de lire ou faire lire dans leurs synagogues la lettre du cardinal Saliège, le samedi 16 juillet, anniversaire des rafles où 13000 personnes, hommes, femmes et enfants, furent arrêtés, détenus au Vélodrome d’Hiver puis transférés dans des camps de transit avant d’être envoyés dans les camps de la mort.

Lettre pastorale du cardinal Jules Saliège sur la personne humaine, 23 août 1942 :

« Mes très chers Frères,

Il y a une morale chrétienne, il y a une morale humaine qui impose des devoirs et reconnaît des droits. Ces devoirs et ces droits, tiennent à la nature de l’homme. Ils viennent de Dieu. On peut les violer. Il n’est au pouvoir d’aucun mortel de les supprimer. Que des enfants, des femmes, des hommes, des pères et des mères soient traités comme un vil troupeau, que les membres d’une même famille soient séparés les uns des autres et embarqués pour une destination inconnue, il était réservé à notre temps de voir ce triste spectacle.

Pourquoi le droit d’asile dans nos églises n’existe‐t‐il plus ?

Pourquoi sommes nous des vaincus ?

Seigneur ayez pitié de nous.

Notre‐Dame, priez pour la France.

Dans notre diocèse, des scènes d’épouvante ont eu lieu dans les camps de Noé et de Récébédou. Les Juifs sont des hommes, les Juives sont des femmes. Tout n’est pas permis contre eux, contre ces hommes, contre ces femmes, contre ces pères et mères de famille. Ils font partie du genre humain. Ils sont nos Frères comme tant d’autres. Un chrétien ne peut l’oublier.

France, patrie bien aimée France qui porte dans la conscience de tous tes enfants la tradition du respect de la personne humaine. France chevaleresque et généreuse, je n’en doute pas, tu n’es pas responsable de ces horreurs.

Recevez mes chers Frères, l’assurance de mon respectueux dévouement.

Jules‐Géraud Saliège Archevêque de Toulouse 13 août 1942